De nombreux voyages professionnels (conférences, colloques) ou de découverte personnelle m’ont en effet conduite dans la plupart des pays d’Europe du Sud, de l’Est et du Nord, au proche et au Moyen-Orient, en Afrique du Nord (Maghreb, Libye), en Asie (Inde principalement) et Amérique du Nord (USA, Canada). Découverte des villes étrangères, marches en montagne ou dans le désert, ont continûment donné sa respiration profonde à ma vie sédentaire.
De tous les pays visités, c’est la Grèce vers laquelle je suis le plus souvent revenue, en pensée durant l’hiver puis pour de bon à partir du printemps, et parfois jusqu’aux derniers jours de l’automne selon les années, quand la brume et l’humidité commencent à envahir les iles. Si la culture est « la poursuite de la douceur et de la lumière » (M. Arnold), alors la Grèce est le lieu au monde où je me serai le plus « cultivée ». Une fois l’an au moins, l’attraction pour l’archipel grec se fait si pressante qu’il me faut retourner m’immerger dans la lumière de l’Hellade dont le spectre va du nacré le plus subtil au bleu le plus cru.
Les terrasses et les vagues la main dans la main
un pied nu qui contracte sagesse dans le sable
Une cigale qui a pris l’ascendant sur mille autres
la conscience omnilucide comme un jour d’été.
Odysseus Elytis, « Les Laudes », Axion Esti.
Tenter de vraiment voyager dans un monde envahi par le tourisme de masse est une gageure, un défi de tous les instants. Ni les dangers, réels ou imaginaires, ni les découvertes ne sont plus les mêmes qu’à l’époque, pas si lointaine, où Anne-Marie Schwarzenbach et Ella Maillard parcouraient seules en voiture l’Afghanistan. La philosophie du voyage, de l’errance et de la « vie nomade » n’en constitue pas moins l’un des versants de ma réflexion très tôt placée sous le signe d’Hermès, dieu des voyageurs, des échanges en tous genres et des grandes mutations.